mercredi 15 mai 2013

"Le langage et le raisonnement logique chez l’enfant", par Paul-Eric Langevin (2013)

Le langage et le raisonnement logique chez l’enfant 

Paul-Eric Langevin



Les actions et les expérimentations de l’adulte trouvent leur base dans les schèmes et les conduites développés par le petit enfant. La science expérimentale dans son entier est fondée sur la coordination entre moyen et fin découverte dans l’enfance, ainsi que sur la découverte et l’invention de moyens nouveaux en passant par les différents stades du développement. Les stades se cumulent, se construisent les uns sur les autres, les uns par rapport aux autres, parfois même les uns contre les autres. Les combinaisons mentales utilisent les images mentales et se servent des découvertes des opérations logiques de conjonction et de disjonction, de la logique de base.

La construction du réel est un subtil arrangement entre le milieu extérieur perçu par les sens, les interactions avec les adultes, la mise en place des objets et des mots, la construction du langage. L’affectivité tient une place essentielle dans ces différentes constructions. L’intelligence verbale se met en place au fur et à mesure de la construction du lexique, du lien entre le lexique et les objets de la réalité ainsi que de l’acquisition du sens qui se fait en interaction avec les adultes. C’est une combinaison très complexe du lexique, de la syntaxe et du sens qui permet à l’enfant de développer le soi verbal.

Les étapes se succèdent : pré-logique, pré-concept, pré-opérations, puis les concepts, les opérations, la logique se construisent petit à petit dans le cerveau de l’enfant grâce à des capacités génétiques et innées aussi bien qu’à l’interaction avec le milieu. L’adaptation agit dans les deux sens : adaptation de l’enfant au milieu ainsi que du milieu à l’enfant. C’est ce que Piaget appelle l’assimilation et l’accommodation. Les schèmes se composent les uns avec les autres pour créer les savoir-faire, les habitudes, les actions quotidiennes de l’enfant. Il procède généralement dans ses schèmes d’action par essai et erreur. C’est ce qui forme petit à petit l’expérience quotidienne de l’enfant.  Les actions se font plus ou moins par imitation puis par imitation différée des actions réalisées par les adultes. L’imitation différée est plus tardive, elle nécessite la permanence de l’objet. Les réactions circulaires deviennent de plus en plus complexes : corps propre, interaction avec les objets puis expérimentation. C’est cumulatif, c’est-à-dire que l’enfant apprend à faire des choses de plus en plus compliquées, sans oublier ses précédentes acquisitions.

Le soi se construit et devient plus élaboré au fur et à mesure de l’acquisition et de la construction des stades pour finalement évoluer vers une conscience individuelle et une conscience des autres. La dissociation des facteurs est essentielle à la construction du raisonnement hypothético-déductif et au développement de la pensée logique. Elle est en jeu dans les expérimentations des enfants comme dans les problèmes quotidiens à résoudre par les adultes, par exemple trouver la cause du fait qu’une lampe ne marche pas.

La pensée combinatoire est présente à partir du moment où l’enfant a déjà compris comment utiliser les raisonnements de la pensée concrète. Les raisonnements combinatoires sont découverts par la suite et se révèlent être de nature plus abstraite et formelle. Le hasard vient assez tard dans les diverses acquisitions de l’enfant, qui préfère d’abord privilégier la pensée magique. Par la suite, l’enfant puis l’adolescent, grâce à la pensée formelle, commencera à raisonner en termes de probabilités.

Les opérations logiques peuvent se combiner entre elles pour donner d’autres opérations, ce que l’enfant peut commencer à faire à partir du moment où il a déjà réussi à combiner les objets dans son expérience quotidienne grâce aux raisonnements de la pensée concrète. La figuration, les images mentales et la mémoire aident à mettre en place la pensée formelle. La causalité prend une signification de plus en plus proche de la réalité, étant d’abord de type magico-phénoméniste pour laisser place par la suite à une réflexion de type hypothético-déductif. C’est par l’expérimentation active sur son entourage que l’enfant prend conscience des causes et des effets, exactement de la même façon qu’un scientifique qui met en place une expérience, mais à un niveau plus fondamental. Les réactions avec l’environnement sont d’abord concrètes, effectuées par tâtonnements puis l’enfant commence à élaborer des pensées, des raisonnements logiques au fur et à mesure de la mise en place de la permanence de l’objet, du symbole, de la représentation et de la construction de la pensée logique abstraite.

La représentation permet l’élaboration d’une réflexion imagée et abstraite, basée non plus sur le monde extérieur mais sur une manipulation d’images mentales. Ce seront les applications de ces images mentales au milieu extérieur qui feront évoluer les actions et les expérimentations actives et permettront de développer les capacités de l’expérience. Sans la représentation, il n’y a pas de capacités logiques abstraites ni de raisonnement grâce à des images mentales.

L’espace, le temps et les objets se coordonnent dans la pensée de l’enfant pour mettre en place une connaissance et une construction du réel. Les opérations logiques sont acquises petit à petit : la conjonction, la disjonction, la négation, l’implication, l’équivalence et toute la logique de base sont acquises grâce aux interactions avec les objets et avec les adultes, ainsi qu’avec la construction du langage et la manipulation des objets et des mots. La logique des classes, l’inclusion, l’appartenance, les différentes notions logico-mathématiques se mettent en place chez l’enfant de la même façon que les mathématiciens ont tenté de façon plus rigoureuse de construire la mathématique moderne.

Les méthodes sont d’abord empiriques puis deviennent opératoires et abstraites. L’enfant redécouvre ainsi les notions d’objet, d’élément, d’ensemble, de classe, de nombre, de lettre, de mot. Toute la logique et la mathématique en découlent ainsi que la syntaxe et la grammaire. Des liens sont faits entre les différentes notions et les différentes capacités. Par exemple, la différence entre les ordinaux et les cardinaux est tout autant une différence logique qu’une différence au sein du lexique. Une fois que le nombre est construit dans la pensée de l’enfant, il peut acquérir les notions de plus en plus abstraites d’addition, de soustraction, de multiplication, de division ainsi que les éléments grammaticaux comme les conjonctions de coordination, de subordination.

Les différents schèmes se coordonnent et se complexifient grâce aux deux opérations importantes d’assimilation et d’accommodation, qui vont permettre au sujet de construire ses propres représentations et ses propres réactions. Une fois les schèmes de base construits, l’enfant développe une certaine forme de pensée logique. Les opérations de base vont être assimilées ainsi que la logique des classes et la logique des relations. La logique des classes consiste à construire des groupes d’objets et des catégories entre ces objets. Par exemple, l’enfant va commencer à distinguer la classe des animaux, celle des végétaux mais aussi des classes selon plusieurs variables particulières, la couleur, la taille, la forme, le nombre, etc. On pourra alors distinguer la classe des chiens noirs, celle des chiens blancs mais aussi celle des fleurs rouges ou celle des fleurs bleues. Les notions de théorie des ensembles de base peuvent alors être abordées, les éléments, les ensembles, les sous-ensembles, l’inclusion, l’appartenance, l’égalité, les sous-classes, les opérations sur les ensembles et sur les classes. De même que la logique des classes, on peut alors mettre en place la logique des relations. Les relations binaires, l’égalité, l’inégalité, l’implication, l’équivalence sont les bases qui vont permettre ensuite de faire comprendre l’arithmétique élémentaire. Mais pour que l’arithmétique soit comprise, il faut passer aussi par la genèse de la notion de nombre.

Les expérimentateurs ne s’entendent pas tout à fait sur l’âge auquel la notion de nombre est construite par l’enfant. Certains pensent que les nombres, du moins les premiers chiffres, sont perçus par les enfants en bas âge mais les expérimentations qui en déduisent ces résultats ne sont pas tout à fait convaincantes. Pour Piaget et pour la plupart des spécialistes de la question, il faut attendre la découverte de la fonction symbolique, de la permanence de l’objet et de la représentation pour qu’un enfant puisse concevoir la notion de nombre et commencer à dénombrer et à compter puis utiliser l’arithmétique de base. Il y a une relation certaine entre le développement du concept de nombre et la capacité linguistique mais elle n’est pas encore tout à fait comprise. Les enfants de quatre ou cinq ans sont tout à fait capables de compter jusqu’à dix et au-delà. Même les enfants de deux ou trois ans commencent à cerner la signification des premiers chiffres de l’arithmétique décimale. Mais pour les enfants plus jeunes avant la mise en place de la conservation de l’objet, les connaissances dans ce domaine sont encore de l’ordre de la spéculation.

C’est aussi à cette période que vont apparaître les premiers mots. Il faut bien distinguer alors l’apparition du lexique et l’apparition du sens. Le lexique est découvert par l’enfant qui fait un lien entre un mot qu’il entend dans son entourage et qu’il répète grâce à ses premières capacités phonétiques et phonologiques. Il fait le lien entre le mot en question qu’il découvre grâce à la médiation des adultes et l’objet qu’il découvre dans l’espace de la vie quotidienne. Il y a donc deux opérations qui se font en lien l’une avec l’autre : la mise en place des mots dans l’esprit de l’enfant et la mise en place du sens, selon la distinction déjà établie par Saussure entre le signifiant et le signifié.

L’objet est découvert par l’enfant, quelle que soit sa langue maternelle. Mais selon des différentes langues maternelles, les signifiants ne seront pas les mêmes. Cela signifie que selon la langue que l’enfant acquiert, il ne va pas penser le monde de la même façon. Le lexique des différentes langues n’est pas structuré de la même façon et ne s’utilise pas à l’identique. Il y a cependant des constantes selon les langues et les cultures.

Une fois le lexique et le sens acquis, l’enfant va alors développer ses premières capacités syntaxiques, en associant des mots les uns avec les autres, tout d’abord d’une façon relativement simple selon ce qu’il a à dire mais ensuite de plus en plus précisément. L’enfant a en général beaucoup plus à dire lorsqu’il commence à dire les mots «papa», «chat» ou «chaussette». Mais il n’est pas encore capable de dire tout ce qu’il a à l’esprit. Par la suite, l’acquisition de la syntaxe se fera par essais et erreurs sous la tutelle des adultes. Le rôle de l’intuition, de la logique et du symbole sont essentiels dans le développement de la capacité linguistique. Ces différentes capacités permettent d’élaborer une pensée linguistique et une intelligence verbale.  Mais le plus important sera le sens que l’enfant va donner à son expérience immédiate grâce aux interactions avec les adultes. Sans la tutelle des adultes, le sens ne pourrait s’acquérir, comme on en a eu certains exemples avec l’existence des enfants sauvages. C’est la fonction symbolique ou fonction sémiotique qui permet de mettre en place le sens des mots et de faire des liens entre les mots et les choses. Tout va se structurer ensemble, le lexique, la syntaxe, le sens pour donner la possibilité à l’enfant de maîtriser sa langue maternelle. Il aura par la suite la possibilité d’apprendre par essais et erreurs en comparant avec les capacités déjà acquises. Chez certains enfants, notamment ceux qui ont des parents de nationalité différente, deux langues maternelles peuvent être acquises en même temps, d’une façon un peu plus complexe mais le processus reste à peu près le même.

Piaget a utilisé les théories de Pierre Janet sur l’évolution en parallèle des structures cognitives et des structures affectives pour élaborer ses propres théories, en particulier la distinction entre intelligence sensori-motrice et sentiments individuels. Janet distingue sur un plan cognitif les réflexes, les habitudes, les représentations, les opérations et sur un plan émotionnel les tendances instinctives, les émotions, le plaisir et la douleur, les affects intuitifs et normatifs ainsi que les sentiments idéologiques comme la morale. 

Piaget distingue la psychologie génétique et la psychologie de l’enfant qui selon lui, sont incluses l’une dans l’autre, dans le sens où d’une part, la psychologie génétique permet de comprendre le développement de l’individu jusqu’à la période actuelle et englobe donc la psychologie de l’enfant mais pas seulement celle-ci et d’autre part la psychologie de l’enfant peut être vue sous plusieurs aspects, pas seulement celui de la psychologie génétique.

L’étude de la notion de causalité chez l’enfant est une étape majeure dans la compréhension de la psychologie enfantine et de ses capacités cognitives. On distingue la causalité physique de la causalité entre objets. L’enfant, dans les premiers temps de l’élaboration de sa pensée, va imaginer l’attribution d’un pouvoir causal aux objets. C’est un raisonnement semblable à de la pensée magique, mais qui possède un certain aspect de rationalité. Bien que ce soient les individus qui causent le déplacement des objets, une fois ceux-ci mis en mouvement, ils peuvent interagir les uns avec les autres. On parle alors de spatialisation et de physicalisation de la causalité. Il faut bien comprendre qu’il existe une causalité spatiale et une causalité temporelle dans le déplacement des objets, ce que l’enfant apprend au fur et à mesure de ses expérimentations.

Sur le plan de la découverte, de l’élaboration et de la construction de la logique, l’enfant construit successivement les opérations logiques, le classement, la sériation. Il va alors commencer à maîtriser les tableaux à doubles ou multiples entrées. C’est ce procédé qui sera utilisé plus tard par l’adolescent pour comprendre la notion de matrice en algèbre. Sur le plan des opérations logiques, de nombreuses notions vont se construire progressivement comme celle de relation : les relations binaires, les relations d’égalité, les relations d’équivalence, les relations d’ordre et les notions concomitantes comme les relations symétriques et asymétriques, la réflexivité, la symétrie, la transitivité. Une autre notion logique essentielle que l’enfant peut comprendre assez rapidement est celle de quantificateur. Il suffit alors de lui expliquer qu’en termes de classes ou de catégories, on peut prendre l’exemple d’un élément (poupée, dé, jeton) pour lui expliquer simplement la notion de quantificateur existentiel et l’exemple de toute une collection de ces mêmes objets pour introduire celle de quantificateur universel. Il est bien entendu que les termes de la logique classique ne sont pas introduits à l’enfant qui n’arriverait pas encore à maîtriser un  vocabulaire formel mais les notions en elles-mêmes sont assez claires pour être introduites, sur le plan de la pensée concrète avec des exemples bien clairs tout d’abord, puis par la suite sur le plan de la pensée formelle dans l’enfance et au cours de l’adolescence.

Piaget a spécialement mis en évidence dans la pensée logique de l’enfant le rôle d’un groupe d’opérations qu’il a baptisé groupe INRC (I= action, N=négation de l’action, R=réciproque de l’action, C=négation de la réciproque). Ce groupe peut servir à comprendre la façon dont les enfants et les adolescents réfléchissent avec des problèmes simples comme la compréhension du mécanisme de la balance de Roberval par exemple. D’autres expériences physiques et logiques peuvent être expliquées aux enfants de la même façon : le fonctionnement du billard, la flexibilité de plusieurs tiges de raideurs différentes, la chute d’un objet sur un plan incliné, etc. Mais les problèmes particulièrement intéressants à aborder sont ceux qui font intervenir les notions de hasard et de combinatoire comme le jeu de dés, le classement de jetons de couleur ou l’exemple des couples de poupées de couleurs différentes.  De nombreuses autres expériences peuvent être introduites dès l’enfance et au début de l’adolescence. Piaget en a utilisé un certain nombre pour mettre en évidence les capacités cognitives des enfants qu’il observait : transmission du mouvement avec des billes, pendule de Newton, illusions d’optique, etc.

Lors de ces différentes expériences, on peut remarquer le rôle des fonctions figuratives, celui des images mentales et des représentations abstraites chez l’enfant. Une autre notion que l’enfant comprend assez rapidement est celle de transformation en géométrie, spécialement les translations et les rotations.

Piaget a remarqué l’importance de deux concepts particuliers dans l’élaboration de 
la pensée de l’enfant : c’est ce qu’il a appelé l’équilibration et l’abstraction.



Jean Piaget


Bibliographie:

-Jean Piaget,

Le langage et la pensée chez l’enfant, 1923 

La formation du symbole chez l’enfant, 1945 

Six études de psychologie, 1964

Psychologie et pédagogie, 1969 

-Henri Wallon,

Les origines du caractère chez l’enfant, 1934 

De l’acte à la pensée, 1942                           

  Henri Wallon

vendredi 11 janvier 2013

"L'acquisition des énoncés elliptiques en anglais", par Paul-Eric Langevin et Mouna Abid (2013)

Mouna Abid et Paul-Eric Langevin     

Syntaxe formelle et syntaxe comparée

Anne Abeillé



"L'acquisition des énoncés elliptiques en anglais" 
Présentation de l’article de Jonathan Ginzburg et Dimitra Kolliakou (2009)



I - Introduction

NSU : énonciation dont il manque un constituant (la plupart du temps verbal). On inclut dans les NSU les « réponses courtes (short answers) » et les énoncés de reprise utilisés pour reconnaître ou pour clarifier des énoncés.

L'acquisition du langage est souvent vue comme un processus d'augmentation de la longueur des énoncés par les enfants alors  qu'une chose commune chez les adultes (compétence de l'adulte) est l'habilité d'utiliser des short énoncés quand le contexte le permet.

L'étude : l'émergence de certaines classes de NSU dans le langage des enfants (corpus de Manchester : corpus CHILDES).

Principale étude : the LATE SHORT QUERY EFFECT, les NSQ (queries) sont acquises plus tardivement que les NSA (answers) bien que les enfants soient mis dans un contexte où l'utilisation est courante (des adultes les utilisent fréquemment en leur présence pour l'étude et font en sorte qu'ils puissent les utiliser).

Période où l'enfant produit des phrases interrogatives, des déclaratives elliptiques et les lexèmes polaires oui et non, les NSQ sont absents.

L'étude porte sur des enfants entre 2/3 ans et elle s'est faite pour 2 langues : pour des enfants Grecs et des enfants Anglais

Résultats : montrer comment modéliser cet effet dans une approche construction orientée Dialogue dans lesquels les NSU sont soit des mots grammaticaux soit des constructions dont le prédicat principal est un paramètre contextuel + résultats sont problématiques pour les analyses de NSU en termes de mécanisme unique, généralisé de réduction phonologique + esquisse d'explication pour l'ordre d'acquisition des NSU : notion qui combine l'accessibilité des paramètres contextuels et la complexité de la construction de contenu.

Toutes les études sur l'acquisition du langage montrent l'importance du contexte dans lequel l'enfant est exposé mais peu d'études sur les NSU fournissent des analyses syntaxiques et sémantiques du phénomène.



II - La distribution des constructions NSU chez les adultes Anglais et les explications grammaticales possibles

Les NSU chez les adultes en dialogue
Fernandez et Ginzburg (2002) classification : 15 classes de NSU

la majorité des classes NSU utilisent l'interrogation et la réponse (5 classes) : l'émergence des NSU concerne ces 5 classes

1- Réponses Affirmative et Rejection (41%) / Plain et Repeated => question polaire et réponses aux assertions 

A: Did Bo leave? B : Yes / No
/  repeated = Bo, yes plain = mmmh...

2- Short answer (38%) => réponses elliptiques à des wh-questions
who left ? Bo.

3-Clarification Ellipsis / CE (16%) => utiliser pour clarifier une énonciation qui n'a pas été entièrement comprise 

A: Did Bo leave? B: Bo ? 

4- Sluicing (5%) 33% en tout de questions wh-interrogatives

A: Someone left? B: Who?

-->Direct sluicing : l'antécédent de la sluice est compris sans difficulté
-->Reprise sluice : ne comprend pas certains aspects de l'énonciation alors que le locuteur savait
-->Repetition sluice : la sluice est utilisée pour demander une répétition de l'énonciation précédente dans son ensemble.

Comme les sluicing les CE sont ambigus entre 2 lectures :
-la lecture confirmation clausale : exemple : « 3 tu veux dire ? »
-la lecture constituant attendu : exemple : « que veux-tu dire par ? » 

Explication des NSU : avec ou sans construction
                    théories qui suivent l'ancienne route : théories unitaires pour lesquelles la résolution elliptique est avec un seul, typique mécanisme extra-grammatical.
                    Théories qui suivent la route plus tardive : théories constructionnistes pour lesquelles les NSU sont incorporées dans la grammaire comme des constructions distinctes.

Dans la 1ere approche : underlying sententialism : les NSU sluicing et short answers sont analysées comme sous-jacentes des constructions SENTENTIAL
HOU approche : the higher-order unification pour VP elliptique 

                    alternative aux approches unitaires : approche DIALOGUE-ORIENTED CONSTRUCTIONISM : les NSU sont des mots grammaticaux (yes, no, pardon) ou des constructions (short answer, sluicing) où la composition sémantique est d'abord conduite par le contexte plutôt que par la syntaxe.



III- Description des résultats concernant l'acquisition des NSU basé sur le corpus Manchester (enfants anglais) 

Une asymétrie dans l'acquisition des NSU
-NSU des 2/3 ans = étude d'enfants anglais corpus Childes, 12 enfants locuteurs anglais (lesquels c'est la seule langue), activités avec leur mère et enregistrements 2 fois chaque 3 semaines : transcription de 4 enfants

→ évidence que les short answers ont été acquises par les 4 enfants
→ ¾ montrent une préférence à l'utilisation des NSU sentential answers
→ tous les sujets utilisent productivement les questions, prioritairement les wh-questions (what et where acquis en début d'expérience)
→ pour les ¾ des sujets, les NSQ (sluicing et CE) sont pratiquement absents alors que toutes les mères utilisent de manière productive les NSQ. 

2 Généralisations à l'émergence des NSU
- généralisation empirique 1 et 2
1 : short answers et les interrogatives acquises, les NSQ (sluicing et CE) sont dans l'ensemble absents
2 :NSQ présents dans le discours des adultes 



IV – Discussion sur des possibles explications pragmatiques sur ce corpus / explications qui n'expliquent pas entièrement l'effet observé / brèves explications pour le corpus Grec qui donnent à peu près les mêmes résultats que le corpus anglais 

Utilisation de plusieurs corpus : Aran, Becky, Carl, Dominic répondant aux questions de leur propre mère et parfois aux questions d’un chercheur 

Etablissement de statistiques sur les résultats donnés par les corpus 
Tableaux détaillés à expliquer : tableaux 9 à 12 

Résultats test du chi deux, test de Fisher, données sur les probabilités
Comparaison avec les données établies avec les enfants grecs et leurs mères (corpus CHILDES)  
Mairi, Mairi et sa mère : résultats donnés dans les tableaux 13 et 14

Deux explications sont possibles à l’établissement de l’effet réponses courtes tardives (late short query effect) : pragmatique ou mécaniste. 

Explication pragmatique : deux raisons données pour l’absence de NSQ (non sentential queries ou questions non verbales)

-contextuelle

-désirabilité sémantique

Explication mécaniste : 

absence de compétence linguistique ou conversationnelle appropriée 

(14) Contexte: les enfants maitrisent-ils le rôle du contexte dans la production des NSQ ? Production des NSQ dans un contexte donné 

(15) Désirabilité sémantique : Les enfants saisissent-ils le sens des NSQ ? Arrivent-ils à produire du sens avec les NSQ ? 

Ginzburg et Kolliakou considèrent l’explication pragmatique pas suffisante, ils veulent démontrer la nécessité d’une explication mécaniste 

(16a) Contexte déclencheur des NSQ : il est en général différent de celui utilisé par les adultes 

(16b) l’enfant élabore des requêtes en utilisant des constructions non elliptiques 
                      
Nous avons 6 types de données différentes dans un premier temps, avec comme acteurs Aran, Becky et leurs mères respectives ; dans chaque cas, l’enfant répond aux questions de sa mère.
Aran : NSQ potentielles mais non réalisées 

Becky : NSQ non potentielles, ambigües 

Résultat : Aran évite de produire des NSQ, Becky a maîtrisé la production des NSQ mais échoue dans leur construction 

Nous avons 6 autres types de données, mettant cette fois-ci en scène Carl et Dominic 

Carl : What, Where, Yes 

Dominic : What ?, What 

Désirabilité sémantique : les NSQ doivent être quelque chose que les enfants devraient avoir le désir de produire 

Productions plus tardives : production significative de NSQ chez Aran ainsi que chez Becky                 
Becky : What, Why 

Absence totale d’ellipse de clarification (clarification ellipsis, CE) chez les deux enfants 
Absence de NSQ en début de production : compétence insuffisamment développée

Résultats du test du chi deux et données des probabilités : 

Aran : chi deux=1.6 ; p=0.1 ; p=0.18

Becky : chi deux=0.98 ; p=0.16 ; p=0.31 

Distribution des phrases  verbales et averbales dans le tableau 
Emergence des NSU en grec : autres expériences et corpus avec Mairi et sa mère, choisies parmi 4 enfants grecs et leurs mères respectives 

L’émergence tardive des NSU et des questions elliptiques n’est pas due à des facteurs essentiellement linguistiques. C’est tardif aussi dans la production des enfants grecs. L’effet étudié est donc indépendant de la langue.

Tableaux 9 à 12 : cf article ; tableaux 13 et 14 : idem 



V – Comment the LATE SHORT QUERY EFFECT peut être modélisé grammaticalement et esquisse d'explication : combinaison de l'accessibilité des paramètres contextuels et la complexité de la construction de contenu. 

Tableau 16 : paramètres contextuels 

figures 1 et 2 : hiérarchies de types interrogatifs (Ginzburg et Sag) 

(29) (30) complexité 

tableau 17 : composition sémantique 

Explication pragmatique pas suffisante, explication mécaniste nécessaire, nécessité d’utiliser une grammaire orientée dialogue 

(24a) grammaire et système contextuels dans lesquels les réponses courtes et les propositions interrogatives verbales coexistent sans NSU 

(24b) ordre d’acquisition : explication de l’émergence de NSA avant les NSQ 
Description de l’analyse contextuelle et grammaticale, conditions de parallélisme syntaxique et/ ou phonologique 

Lexèmes polaires : yes/no
question polaire p ?, dérivée d’une assertion p : 

A : did Bo phone ?

B : Yes / No                                                                                                                                             

A : Bo phoned 

B : Yes / No 

? Phone (b,t) 

Réponses courtes:

A: who phoned?

B: Bo 

lambda x phone(x,t) 

Sluicing direct:

A: a student phoned   B: who? 

? il existe x phone(x,t)

Sluicing en reprise, clarification ellipsis
(ellipse de clarification,  CE) 

A: did Bo leave?

Lambda x Ask (A,? Leave(x)) 

Cette interprétation sémantique est résumée dans les tableaux 15 et 16 

Hiérarchie des types interrogatifs (figure 1), hiérarchie des NSU (figure 2) 

Spécification d’une grammaire et d’un système contextuels dans lesquels les réponses courtes et les
interrogations verbales coexistent sans les NSQ 

Ordre d’acquisition des NSU : NSA émergent avant NSQ 
Complexité sémantique et contextuelle 

CE > sluicing > yes/no > réponses courtes (Aran et sa mère) 
CE > yes/no > sluicing > réponses courtes (Becky et sa mère) 

Mère de Becky : 20 NSQ par conversation dont 14 CE 
Mère d’Aran : 18 NSQ dont 10 CE 

Complexité de composition sémantique : c’est la complexité des opérations sémantiques utilisées pour construire le corpus ; nécessité d’utiliser aussi l’accessibilité contextuelle 

(29) C1 < C2  si et seulement si C1 a un background contextuel plus simple que C2 OU C1 et C2 ont des backgrounds contextuels équivalents mais la combinatoire de C1 est plus simple que celle de C2

Composition des différentes complexités : elles contiennent les éléments suivants 

*application de fonction 

*lambda abstraction 

*extraction de proposition 

*substitution 

*négation 

*questions polaires 

Tableau 17 : complexités différentes associées aux diverses classes de NSU considérées 

(30) Réponses non-verbales < questions non-verbales 

Tableaux 15 et 16 : interprétation sémantique
Tableau 17 : différentes complexités



VI : Conclusion

Nous avons démontré l’existence du Late Short Query Effect (Effet réponses courtes tardives) et avons précisé l’importance de l’étude du contexte et de la désirabilité sémantique. Les données sont bien valables aussi bien en anglais qu’en grec, ce qui prouve l’indépendance de ce phénomène aux variables dépendant de la langue étudiée. Nous avons utilisé une approche grammaticale qui intègre les informations phonologiques, syntaxiques et sémantiques et avons combiné l’accessibilité aux paramètres contextuels et l’étude de la complexité sémantique.